Franche-Comté - Fromages - La Cancoillotte

La cancoillotte (qu’on écrit parfois cancoyotte), dite aussi familièrement la «cancoille» est une des plus anciennes spécialités de Franche-Comté. Des textes de l’époque de Charles Quint la mentionnent déjà. Certains comme Jean-Marie Garnier, dans La Haute-Saône culinaire, affirment même Jules César l’aurait évoquée lors de son arrivée chez les Séquanes (anciens habitants du territoire actuel de la Franche-Comté) dans son histoire de la guerre des Gaules mais il n’a pas été possible d’en retrouver la trace.

Que la cancoillotte existe donc ou non depuis plus de deux mille ans, c'est un fromage typique de la gastronomie franc-comtoise, également surnommé familièrement «la Colle» (ou, localement, «la Coille») en raison de son aspect. Elle est également réputée pour son goût et son odeur très prononcés qui peuvent intimider des dégustateurs non initiés, déjà fort étonnés par sa consistance semi-liquide

Ce qui paraît avéré, c’est sa présence dans une ferme d'Oyrières (Haute-Saône), sans doute la ferme Guerret, dans le courant du 16e siècle. Historiquement, elle semble plutôt née dans les fermes du Haut-Jura mais laissons de côté cette querelle d’experts sans importance, la plupart des grandes découvertes, culinaires y comprises, apparaissant presque toujours simultanément à des endroits parfois assez éloignés. La cancoillotte, qui n’échappe pas à la règle, est née tout simplement de la volonté de ne pas avoir à jeter du lait écrémé trop rapidement caillé. Le mot lui-même de cancoillotte ne fait son apparition dans le vocabulaire qu’à la fin du 19e siècle.

Mais qu’est donc la cancoillotte et comment la fait-on?

Jusqu’à une époque récente, les familles comtoises fabriquaient elles-mêmes leurs propres cancoillottes mais avec des résultats variés : certaines fort réussies et appréciées, d’autres un peu moins. On l’achetait sous forme de «grumeaux» (petit lait séché et présenté en mottes à odeur particulièrement forte) et on la faisait cuire à feu doux avec un peu d’eau ou de lait et sans oublier de saler le tout à la convenance de chacun.

Les jeunes générations préfèrent consommer des cancoillottes toutes prêtes, achetées chez leurs crémiers ou en grande surface, en étant assurées de trouver un produit de qualité constante. On l’y trouve en pots de tailles variées, soit nature, soit à l’ail, cancoillotte nature et cancoillotte à l’ail ayant chacune leurs partisans. Sans oublier la cancoillotte au vin jaune, histoire de faire deux fois plus plaisir aux papilles.

Un détail mais qui a son importance: étant issue du petit lait écrémé, la cancoillotte ne contient en moyenne que 3,5 à 5,5% de matières grasses, un véritable record planétaire, le bonheur total pour ceux qui doivent surveiller leur taux de cholestérol. Et seulement 107 calories pour 100 grammes. Avis aux médecins nutritionnistes et aux diététiciens: enfin un fromage qui convient à tous (sauf aux allergiques aux protéines du lait), qui permet de maintenir son poids de forme (voire de perdre quelques kg s’il est consommé en remplacement de produits plus gras et plus caloriques) et qui ne colle pas aux artères!

Des créations commerciales récentes, destinées à séduire de nouvelles catégories de consommateurs, offrent des cancoillottes au vin, au cumin, etc. Si les puristes restent attachés à la cancoillotte nature ou à l’ail, rien n’empêche de tester ces innovations et d’y trouver peut-être son bonheur car, c’est bien connu: Des goûts et des couleurs …

La cancoillotte se déguste toute l'année et peut se manger chaude ou froide. Froide sur une bonne tranche de pain artisanal. Mais aussi chaude et donc encore plus liquide sur des pommes de terre accompagnées d’une bonne charcuterie régionale comme la saucisse de Morteau. Rien n’empêche en outre de la savourer avec un verre de vin du Jura avec lequel elle se marie à la perfection. Du pain, du vin … et de la cancoillotte !

Hubert-Félix Thiéfaine a chanté "La Cancoillotte", contribuant ainsi à la renommée de cette spécialité ô combien franc-comtoise.

Écrit par Jean-Marie Thiébaud.

Crédit photo : Corinne Vasselet - BFC Tourisme